In taberna...
(Carmina Burana, in taberna)
(Pieter Bruegel)
In taberna quando sumus
non curamus quid sit humus,
sed ad ludum properamus,
cui semper insudamus.
Quid agatur in taberna
ubi nummus est pincerna,
hoc est opus ut queratur,
si quid loquar, audiatur.
Quand nous sommes dans la taverne,
Que nous importe de n’être que poussière,
Mais nous nous hâtons pour les jeux
Qui nous mettent toujours en sueur.
Ce qui se passe dans la taverne,
Où l’argent est le roi,
Ça vaut le coup de demander, et d’écouter ce que je dis.
Quidam ludunt, quidam bibunt,
quidam indiscrete vivunt.
Sed in ludo qui morantur,
ex his quidam denudantur
quidam ibi vestiuntur,
quidam saccis induuntur.
Ibi nullus timet mortem
sed pro Baccho mittunt sortem.
Certains jouent, certains boivent,
D’autres vivent sans pudeur.
De ceux qui jouent,
Certains se retrouvent nus,
Certains sont habillés,
D’autres sont mis en sac.
Personne ici ne craint la mort,
Mais ils misent le sort pour Bacchus.
Primo pro nummata vini,
ex hac bibunt libertini;
semel bibunt pro captivis,
post hec bibunt ter pro vivis,
quater pro Christianis cunctis
quinquies pro fidelibus defunctis,
sexies pro sororibus vanis,
septies pro militibus silvanis.
Le premier est pour la tournée
Puis les affranchis boivent,
Une autre fois pour les prisonniers,
Une troisième pour les vivants,
Une quatrième pour les Chrétiens,
Une cinquième pour les fidèles défunts,
Une sixième pour les sœurs légères,
Une septième pour la troupe en campagne.
Octies pro fratribus perversis,
nonies pro monachis dispersis,
decies pro navigantibus
undecies pro discordaniibus,
duodecies pro penitentibus,
tredecies pro iter agentibus.
Tam pro papa quam pro rege
bibunt omnes sine lege.
Une huitième pour les frères pervertis,
Une neuvième pour les moines dispersés,
Une dixième pour ceux qui naviguent,
Une onzième pour les plaideurs,
Une douzième pour les pénitents,
Une treizième pour les voyageurs,.
Une pour le Pape et une pour le Roi,
Tous boivent sans loi.
La patronne boit, le patron boit, Le soldat boit, le prètre boit, Celle-ci boit, celui-ci boit, L’esclave boit avec la servante, L’agile boit, le paresseux boit, Le blanc boit, le noir boit, Le pondéré boit, l’inconstant boit, Le fou boit, le sage boit. Le pauvre et le malade boivent, L’exilé et l’étranger boivent, L’enfant boit, le vieux boit, L’évêque et le doyen boivent, La sœur boit, le frère boit, La vieille boit, la mère boit, Celui-ci boit, celui-là boit, Cent boivent, mille boivent. Parum sexcente nummate Six cents pièces filent, Vite, quand, sans retenue, Tous boivent sans fin. Mais ils boivent l’esprit gai, Ainsi nous sommes ceux que tous méprisent, Et ainsi nous sommes sans le sou. Ceux qui nous critiquent iront au diable Et avec les justes ne seront pas comptés.
Bibit pauper et egrotus,
bibit exul et ignotus,
bibit puer, bibit canus,
bibit presul et decanus,
bibit soror, bibit frater,
bibit anus, bibit mater,
bibit ista, bibit ille,
bibunt centum, bibunt mille.
durant, cum immoderate
bibunt omnes sine meta.
Quamvis bibant mente leta,
sic nos rodunt omnes gentes
et sic erimus egentes.
Qui nos rodunt confundantur
et cum iustis non scribantur.